Chefs-d'œuvre restaurés
En 2020, sept chefs-d’œuvre de la collection ont fait peau neuve dans le cadre d’une vaste campagne de restauration. Dépoussiérés, nettoyés, retouchés, mastiqués et vernis, ils rejoignent nos salons sous leur meilleur jour.
Cinq peintures, une table mécanique et une sculpture en terre cuite ont bénéficié d'une campagne de restauration. Pour en savoir plus sur cette opération, Sixtine de Saint-Léger, attachée de conservation au musée Cognacq-Jay, répond à 5 questions.
Pourquoi est-il nécessaire de restaurer ?
La conservation et la restauration des œuvres sont l’une des missions essentielles des musées. Cela implique avant tout la mise en place de conditions de conservation optimales pour prévenir les risques d'altération et éviter ainsi des restaurations systématiques. Toutefois, l’histoire des œuvres et leur nature impliquent parfois de les restaurer. Ces interventions ont pour but de prolonger la durée de vie des œuvres et de les mettre en valeur. C’est une mission très encadrée : suivant un code de déontologie, les restaurateurs s’engagent à respecter l’intégrité et l’authenticité des objets, ce qui exige la réversibilité et la stabilité de leurs interventions.
Qu’est-ce qui a motivé la restauration de ces œuvres en particulier ?
Chaque année, plusieurs œuvres de la collection sont restaurées, en fonction des priorités dictées par leur état de conservation et de présentation, ou par l’actualité de notre programmation. Dans le cas de L’Abreuvoir d’Hubert Robert, c’est l’état de la conservation qui a motivé notre choix. En effet, des craquelures profondes sur la couche picturale appelaient une intervention urgente afin de stabiliser l’état de l’œuvre. Par ailleurs, l’exposition « L’Empire des sens. De Boucher à Greuze » qui ouvrira début 2021, dont François Boucher est la figure d’élection, nous encourageait à restaurer deux superbes tableaux de l’artiste, La Belle Cuisinière et le Portrait de Marie-Emilie Baudouin, pour les présenter sous leur meilleur jour. Pour la sculpture d’une Jeune femme lisant de Pierre-Joseph Michel, un dépoussiérage s’avérait indispensable avant son prêt au musée des Beaux-Arts de Nancy dans le cadre de l’exposition « Les Adam. La sculpture en héritage ».
En quoi ont consisté toutes ces restaurations ?
Avant toute décision de restauration, un diagnostic est établi par le restaurateur après une étude visuelle de l’œuvre et de l’étude de la documentation. Cette première étape est fondamentale car elle détermine les matériaux constitutifs de l’œuvre et son état de conservation, les altérations et leur nature, leur étendue et leur cause. Une proposition d’intervention adaptée est proposée. Pour les peintures par exemple, on distingue deux types de restaurations : la restauration fondamentale, qui intervient sur le support de l’œuvre, et la restauration simple, qui ne touche que la couche picturale. À l’exception de La Belle Cuisinière, toutes les œuvres ont bénéficié de restaurations fondamentales.
Une campagne de restauration comporte toujours un part de surprise, on ne peut jamais totalement prévoir ce que l’œuvre va révéler. Par exemple, pour L’Abreuvoir, les dommages observés au démontage du support ont conduit à réaliser une reprise de transposition, c’est-à-dire que la peinture a été déplacée vers un nouveau support de toile : une opération extrêmement délicate réalisée avec succès.nique des artistes.
Quel est le lien avec les restaurateurs ?
Nous travaillons en étroite collaboration avec des restaurateurs spécialisés par typologie d’œuvres. Les peintures ont été confiées à 5 restaurateurs distincts retenus sur la pertinence du diagnostic technique établi à la suite de l’aller-voir. Ainsi, un tiroir de la table d’Œben a même voyagé jusque dans le Morbihan pour que son mécanisme soit réparé dans l’atelier d’un ébéniste réputé !
La restauration est le fruit d’un échange constant et d’une responsabilité partagée entre l’équipe de conservation du musée et le restaurateur. À chaque étape de l’intervention, il y a donc un dialogue étroit et des rencontres pour s’adapter aux éventuelles découvertes et prendre les meilleures décisions, comme ce fut le cas pour le tableau d’Hubert Robert.
Peut-on voir la différence entre un avant et un après ?
S’agissant des peintures du XVIIIe siècle, le rendu est spectaculaire. L’amélioration de leur état de conservation va de pair avec leur état de présentation. Si l’intervention sur le support est invisible pour le public, elle constitue le prérequis d’une restauration pérenne. Le Portrait de la duchesse de Beaufort de Nicolas de Largillière en est un bon exemple : le cou de la jeune femme est désormais exempt d’une déchirure ancienne aux airs de cicatrice.
De manière générale, le dépoussiérage, le masticage et le revernissage ont véritablement redonné de la fraîcheur aux portraits : on le remarque sur les carnations, dans la lisibilité des détails, le contraste des coloris. Les restaurations ont aussi révélé quelques surprises : sous le tableau La Belle Cuisinière, il pourrait exister une composition sous-jacente, que l’on devine sur les bords du châssis. Quel dessin Boucher a-t-il dissimulé ? Le mystère reste entier. Ainsi, les restaurations sont toujours pour les conservateurs une source précieuse de connaissance sur les œuvres et la tech
Merci aux restaurateurs et restauratrices du patrimoine : Emanuela Bonaccini, Cécile des Cloizeaux, Elena Duprez, Cécile Gouton, Jean-François Hulot, Jean-Yves Le Bot, Agnès Malpel, Marie-Emmanuelle Meyohas et Juliette Levy.